Même si le modèle Marketplace s’est fortement démocratisé depuis quelques années, notamment sur le secteur B2C, celui-ci reste néanmoins en constante mutation où l’opérateur y joue un rôle prédominant. Hier simple intermédiaire facilitant la mise en relation, aujourd’hui véritable tiers de confiance et acteur maître de son écosystème, les ténors Marketplace que sont Amazon, Uber, Alibaba ou encore Airbnb ont su devenir des figures de proue de ce modèle en établissant une confiance mutuelle entre tous les acteurs de la chaîne de valeur (opérateurs, marchands, acheteurs & acteurs secondaires).
Mais comment les opérateurs parviennent-ils à créer et à maintenir cette relation ?
Les rôles et activités de l’opérateur
En s’attribuant davantage de rôles et de responsabilités, les opérateurs se sont positionnés en réels tiers de confiance depuis maintenant quelques années, permettant ainsi de devenir l’acteur central et unique aux yeux des marchands et des acheteurs. Aujourd’hui, un opérateur gère l’intégralité des flux transitant sur sa Marketplace : enrôlement et gestion des marchands, gestion des commandes, acquisition des acheteurs, performance et sécurité de la plateforme, service client et litiges, gestion des paiements et des commissions…
Adopter une posture d’opérateur ne se limite plus à mettre en relation deux acteurs mais à gérer un ensemble de rôles parfois spécifiques aux places de marché. Il doit, par exemple, maintenir un bon équilibre entre le nombre d’offres proposées sur sa plateforme et le trafic engendré par celle-ci. Certains opérateurs ont fait le choix de ne pas opérer l’intégralité de ces rôles ou activités, ce qui peut engendrer des effets néfastes irréversibles, notamment sur leur crédibilité.
La notoriété et l’image de marque sont fortement corrélées avec l’activité exercée par leurs marchands. Un opérateur qui ne contrôlerait pas les offres proposées par ses marchands se mettrait à risque en cas de problème (ex : produits illégaux, produits de contrefaçon) car son image serait immédiatement dégradée. L’opérateur est le garant de la bonne gestion courante de sa plateforme.
Les motivations des opérateurs
Conscients que les attentes marchands et acheteurs sont relativement fortes, les opérateurs ont su prendre le risque d’une mutation en gestionnaire de flux avérés. Les difficultés liées à ces activités sont principalement d’ordre budgétaire, organisationnel et technologique.
Le service client constitue un parfait cas d’étude d’autant plus qu’il est l’un des principaux postes de coûts des opérateurs. De par son fonction, il est très consommateur de temps et donc de ressources. Le service client nécessite de mettre en place une organisation cible adaptée à l’activité existante de l’opérateur soit en recrutant (si manque de ressources avéré) soit en externalisant ce poste de charge. De plus, gérer quotidiennement un service client demande des investissements technologiques notamment en choisissant un outil du marché (SalesForce, iAdvize, Zendesk, Dimelo, etc.).
Pourquoi un opérateur prendrait-il des risques si élevés ?
Par essence, même une Marketplace crée de l’intermédiation, a minima, entre deux acteurs. Sécuriser ce risque de désintermédiation apparaît alors comme vital pour des opérateurs Marketplace tant ils sont assujettis à ce phénomène. Au-delà de la proposition de valeur ou promesse, le gestionnaire d’une Marketplace se doit désormais d’opérer autant d’activités que possible dans le but de sécuriser la désintermédiation. Pourquoi voudrions-nous court-circuiter l’intermédiaire (opérateur) si cela engendre des risques supplémentaires ?
Exemple concret avec le service client : la gestion des litiges par l’opérateur a énormément d’impact dans l’esprit du client. En qualité de tiers de confiance, l’opérateur assurera l’ensemble des activités liées au poste client (ex : gestion des litiges, remboursement, livraison dans les temps, etc.), ce qui réduit considérablement l’anxiété du client face à un éventuelle problème relative à sa commande.
Devenir tiers de confiance c’est avant tout, endosser une forte responsabilité en gérant toutes les activités chronophages et facteurs de stress pour un client. Un opérateur identifié comme telle acquerra beaucoup plus naturellement des clients et des marchands.
De nombreux opérateurs ont réussi avec brio le fait de rendre les marchands et clients dépendants à leurs plateformes. Les ténors en particulier ont su se prévaloir de la concurrence en opérant un ensemble de rôles majeurs et en proposant des services à forte valeur ajoutée orientés client (customer-centric) et vendeur (seller-centric).
Le modèle Marketplace peut cependant avoir quelques sueurs froides avec l’arrivée de la blockchain. De nombreux analystes évoquent la décentralisation de certains des rôles et activités des opérateurs favorisant ainsi leur disparition.
Alexandre Onufryk – Managing Consultant